La complémentaire santé sera généralisée dans quelques jours, mais le contenu de la réforme reste parfois difficile à cerner. Cette situation vise notamment la possibilité de prévoir une clause d'ancienneté à respecter dans un régime frais de santé : les acteurs du secteur sont en effet nombreux à s'interroger sur ce sujet. Cela vient probablement d'un flou orchestré par les textes officiels mais la réponse semble claire en pratique.
La clause d'ancienneté dans le flou à cause des textes officiels
La clause d'ancienneté dans un régime relatif aux frais de santé semble, au premier abord, toujours d'actualité. L'article R. 242-1-2 du Code de la sécurité sociale précise à son dernier alinéa que le fait de réserver l'accès aux "autres prestations" que la prévoyance ou la retraite, (dont font partie les garanties frais de santé) aux salariés de plus de six mois d'ancienneté ne remet pas en cause le caractère collectif de ces garanties. A la lecture de cet article de loi, tout un chacun comprend que le bénéfice des garanties frais de santé peut donc être réservé aux salariés justifiant d'une certaine ancienneté dans l'entreprise.
Le doute s'installe toutefois à la lecture de la circulaire de l'ACOSS en date du 12 août 2015. Cette dernière précise à son point numéro 3 que "aucun salarié ne pourra être exclu d'une couverture santé au titre d'une clause d'ancienneté d'un contrat". Le texte de la circulaire fait bien référence à l'obligation de proposer à tous les salariés un régime frais de santé au 1er janvier 2016. Le raisonnement suivi est donc le suivant : au titre de l'obligation de couvrir tous les salariés, les conditions d'ancienneté pour bénéficier de la complémentaire santé collective ne peuvent être valides dans les contrats conclus entre les entreprises et les organismes assureurs.
Malgré la parution de cette circulaire, la rédaction de l'article R. 242-1-2 du Code de la sécurité sociale demeure inchangée et semble avoir induit en erreur quelques négociateurs d'accords de branche qui prévoient toujours des clauses d'ancienneté à respecter.
Des conditions d'ancienneté caduques dans les accords santé ?
A la lecture de la circulaire de l'ACOSS du 12 août 2015, il faut comprendre que tous les salariés doivent être couverts par un régime frais de santé au 1er janvier 2016, quelle que soit leur date d'entrée dans l'entreprise. Ainsi, toutes les clauses d'ancienneté devraient être caduques au 1er janvier 2016 dès lors qu'elles contreviennent à la réforme de la généralisation de la complémentaire santé à tous les salariés.
Cela n'est pas sans conséquence car de nombreux accords frais de santé prévoient le respect d'une clause d'ancienneté et ont été négociés en prenant en compte ce facteur. L'on peut ainsi citer les accords signés : dans l'industrie du bois (IDCC 158) qui demande 2 mois d'ancienneté, dans les établissements privés d'hospitalisation à but non lucratif (IDCC 29) qui requièrent 3 mois d'ancienneté, dans les ateliers et chantiers d'insertion (IDCC 3016) qui prévoient 4 mois d'ancienneté, ou encore dans la manutention ferroviaire et travaux connexes (IDCC 538) qui demande 4 mois d'ancienneté dans la branche. Cette liste n'est pas exhaustive et les accords santé sont plutôt nombreux (une cinquantaine environ) à préciser le respect nécessaire d'une clause d'ancienneté pour adhérer au régime frais de santé collectif.
Malgré le fait que ces clauses soient bien prohibées par la circulaire du 12 août 2015, les premiers arrêtés d'extension commencent à paraître et n'excluent à aucun moment les dispositions relatives à l'ancienneté. Cela marque l'incohérence et le manque de communication entre les différents services de l'Etat.
Les partenaires sociaux devraient tout de même penser à se réunir pour adapter leurs accords à la réforme en supprimant la clause désormais caduque. Certaines négociations ont d'ailleurs déjà eu lieu en ce sens, notamment dans la convention collective du golf (IDCC 2021) où l'avenant du 19 octobre 2015 est venu supprimer la condition d'ancienneté. Dans le même temps, les entreprises doivent fait attention à bien proposer à tous leurs salariés une complémentaire santé d'entreprise pour ne pas s'exposer à des sanctions.