La généralisation de la complémentaire santé a entrainé plusieurs bouleversements dans le secteur de la santé collective. L'un de ces changements radicaux est l'invalidité des clauses d'ancienneté qui sont nombreuses dans les branches. Ces clauses prévoient qu'un salarié ne peut bénéficier du régime frais de santé collectif qu'à la condition qu'il justifie d'une certaine ancienneté dans l'entreprise. Or, une circulaire de l'ACOSS du 12 août 2015 précise qu'aucun salarié ne peut plus être exclu, depuis le 1er janvier 2016, d'une couverture santé au titre d'une clause d'ancienneté d'un contrat. Cette suppression crée un nouveau risque notamment dénoncé par les agriculteurs qui ont recours à de l'emploi saisonnier.
Les sénateurs relaient l'appel au secours des agriculteurs
Deux sénateurs ont récemment transmis deux questions écrites à M. Le Foll, Ministre de l'agriculture, et à Mme Touraine, Ministre de la santé, afin de souligner la situation périlleuse dans laquelle se retrouvent de nombreux agriculteurs.
La première a été posée par Gilbert Bouchet et concerne les producteurs de semences de maïs et de sorgho de Rhône-Alpes. Dans sa question, il souligne que ces agriculteurs recourent chaque année au recrutement de saisonniers durant l'été. L'accord santé de la production agricole prévoit, depuis l'accord du 15 septembre 2015, une ancienneté requise de 3 mois dans l'exploitation pour pouvoir bénéficier du régime collectif santé. Cette condition permettait jusqu'à maintenant d'exclure les saisonniers, qui sont en contrats courts, de la couverture collective. Or, la fin de la condition d'ancienneté représente un danger pour ces agriculteurs selon le sénateur. Il réclame ainsi à la ministre de permettre aux partenaires sociaux de définir les modalités d'affiliation des salariés en contrat court au régime collectif.
La seconde question provient du sénateur Jean-Jacques Lassere. Il alerte le Ministre de l'agriculture sur les mêmes risques qui pèsent cette fois sur les producteurs de semences de maïs du sud-ouest. Il dénonce la suppression de la condition d'ancienneté qui ignore les nouvelles charges que cela ferait peser sur les agriculteurs, au motif que les salariés en contrat court pourront bénéficier du chèque santé. Il demande alors au Ministre de rétablir la condition d'ancienneté en santé pour les salariés saisonniers.
Les enjeux soulevés par les sénateurs au nom des agriculteurs
Les deux questions posées aux Minsitres de l'agriculture et de la santé mettent en lumière plusieurs risques encourus par les agriculteurs.
D'abord, les sénateurs alertent les Ministres au sujet des nombreuses charges supplémentaires qui pèseront sur les agriculteurs qui ont recours à des saisonniers. En effet, la prise en charge d'une partie des cotisations au contrat collectif imposera des dépenses supplémentaires non négligeables aux professionnels d'un secteur déjà en crise.
Ensuite, les deux questions soulignent l'attitude réticente des organismes de complémentaire santé qui refusent parfois d'affilier les salariés en contrat court au régime collectif. Cette situation met les agriculteurs qui emploient des saisonniers en porte-à-faux entre l'obligation de couvrir tous leurs salariés, sans condition d'ancienneté, et le refus de leur organisme assureur de les prendre en charge. Cela générera nécessairement des procédures administratives supplémentaires et pourra, dans le pire des cas, engager la responsabilité des agriculteurs employeurs qui ne respecteraient par l'obligation de proposer une couverture collective à tous leurs salariés.
La question de l'affiliation des contrats courts à la complémentaire santé collective est donc cruciale. Même si des dispenses d'adhésion existent au profit de ces types de salariés, l'obligation de leur proposer une couverture demeure. A l'heure où le monde agricole (surtout les éleveurs et les producteurs de lait) reste mobilisé pour survivre, le Gouvernement ne restera peut-être pas insensible à l'appel lancé par les sénateurs au nom des producteurs céréaliers.