Comme BI&T le signalait hier, un avenant relatif à la complémentaire santé dans la CCN de la boulangerie artisanale (IDCC 843) vient de paraître.
Cet avenant, à première vue classique, modifie l'alinéa 1 de l'article 3 de l'accord créant le régime frais de santé dans la branche. Cette modification a une conséquence immédiate sur l'application de la complémentaire santé collective mais pose des questions sur les modalités de mise en œuvre du texte.
Fin de la condition d'ancienneté en santé dans la boulangerie artisanale
Conformément au droit applicable, les partenaires sociaux ont mis fin à la condition d'ancienneté d'un mois qui était jusque-là exigée dans la branche de la boulangerie artisanale.
Cette condition d'un mois de présence dans la même entreprise n'est donc plus imposée. Même si, depuis la généralisation de la complémentaire santé, cette disposition n'était pas applicable, le retrait opéré est louable.
Ainsi, aucune confusion n'est plus permise et tous les salariés, quelle que soit leur durée de présence dans l'entreprise, doivent pouvoir bénéficier de la complémentaire santé collective.
Mais les partenaires sociaux ne se sont pas limités à cette modification.
Le bénéfice de la complémentaire santé fixé à 3 mois minimum !
L'avenant signé le 13 octobre 2016 et entré en vigueur le 1er janvier 2017 prévoit surtout une durée minimale de couverture par le régime de complémentaire santé.
Le texte précise que "Tout salarié entrant dans une entreprise relevant du champ d’application de la convention collective nationale, et quelque que soit la nature et la durée de son contrat de travail bénéficiera de la couverture du régime frais de soins de santé au minimum pendant 3 mois hors période de portabilité".
Autrement dit, un salarié embauché pour 2 mois serait couvert obligatoirement pour 3 mois, puis se verrai ensuite appliquer la période de portabilité !
Cette nouvelle incongruité provenant de cette convention collective ne surprendra plus grand monde après la reconduction de la désignation d'AG2R par l'avenant de juin 2016. Par ces dispositions, les partenaires sociaux souhaitent probablement décourager les organismes assureurs concurrents d'AG2R à proposer une complémentaire santé collectives aux boulangers artisanaux.
Mais cette mesure décidée par accord collectif est-elle vraiment applicable ? L'accord envisage qu'un salarié pourrait continuer à bénéficier de la couverture complémentaire après la rupture de son contrat de travail afin de totaliser 3 mois de couverture. Ce n'est qu'après ce délai que la période de portabilité du régime serait alors mise en place. Or, le 1° de l'article L. 911-8 du code de la sécurité sociale précise que "Le maintien des garanties est applicable à compter de la date de cessation du contrat de travail [...] dans la limite de la durée du dernier contrat de travail". La loi fixe précisément un début et une fin au mécanisme de portabilité de la complémentaire santé collective. Si la date de début de la portabilité semble pouvoir être repoussée au nom du principe de faveur qui pourrait être invoqué par les partenaires sociaux ; la date cessation de la portabilité, elle, n'est pas modifiable ! On voit donc mal comment la mesure décidée par les signataires de l'avenant entré en vigueur le 1er janvier 2017 pourrait être applicable.
Cette période minimale de couverture obligatoire pour les salariés de la boulangerie artisanale ressemble donc à une énième tentative de conserver ces entreprises dans le giron d'AG2R. Rien ne dit que les organismes assureurs et les entreprises suivront ce texte à la lettre.