Cet article a été publié sur le site Tripalio.
Selon nos informations, plusieurs assureurs de la place s'apprêtent à renoncer à proposer des offres dédiées à des branches spécifiques. Voici quelles bonnes raisons les y poussent.
La mode éphémère de l'offre dédiée à une seule branche
Historiquement, les assureurs collectifs ont décidé de "fabriquer" des offres dédiées à une seule branche dans la foulée des désignations. On reconnaîtra d'ailleurs à Jean-Pierre Vallon, fondateur du cabinet Abela à Voiron l'initiative prise, il y a dix ans, de proposer un contrat pour les boulangers destiné à concurrencer directement l'offre AG2R choisie par la confédération dans des conditions d'opacité telles que le Conseil d'Etat l'a finalement annulée. La structuration progressive du marché autour d'accords de branche et de contre-offres offensives proposées par les assureurs a favorisé l'émergence de ces offres spécifiques qui sont aujourd'hui pléthore sur le marché.
Certaines branches d'ailleurs donnent lieu à une sorte de course à l'échalote. C'est notamment le cas des bureaux d'études techniques et de l'hôtellerie-restauration, où beaucoup d'assureurs ont ajusté leur offre dédiée à la recommandation de l'accord pour développer leur porte-feuille.
Les handicaps de l'offre dédiée
L'offre dédiée pose toutefois plusieurs problèmes qui peu à peu désincitent les assureurs à la proposer.
Premier point, et point majeur : sa rentabilité. Compte tenu de la forte concurrence depuis la fin des désignations, les assureurs sont obligés de calculer les tarifs au plus bas. Malgré les quelques "facilités" que les branches se sont accordées en fixant les tarifs, l'obligation de concurrencer l'offre de branche pénalise les bénéfices. Les tarifs sont à peine supérieurs à l'équilibre technique, et les acquisitions de portefeuilles servent plus à dégager du chiffre d'affaires et à "mettre le pied dans la porte" plutôt qu'à générer du profit.
De ce point de vue, l'offre dédiée est un pari économique incertain. Il n'offre de perspective qu'à long terme, et l'effort de commercialisation est intense pour des résultats parfois décevants. Les assureurs soulignent tous l'importance de l'effort qu'il faut déployer pour mobiliser et former les réseaux à la vente de ces offres dédiées. Dans la pratique, beaucoup d'acteurs du marché ont donc renoncé à développer des offres dédiées. En tout cas, ils ne les identifient pas comme des relais de croissance.
La dédicace aux branches est pourtant inévitable
Malheureusement, aucun assureur ne peut facilement se détacher de l'offre dédiée aux branches. Une raison simple les y pousse : les offres génériques interprofessionnelles posent plusieurs difficultés techniques et juridiques.
Les offres génériques respectent en effet assez mal les obligations conventionnelles des entreprises. Dans ces conditions, il est peu plausible de les maintenir sans stress juridique durable. Elles nécessitent une adaptation pour passer la rampe, surtout lorsqu'elles sont en concurrence avec une offre dédiée pleinement adaptée aux obligations conventionnelles. En outre, les offres génériques obligent l'assureur à bien préparer la mise en conformité de son stock, ce qui suppose une stratégie complexe de tarification. Comment calculer la surcote d'un contrat dont il faut améliorer trois ou quatre garanties ?
Pour les assureurs, cette situation est périlleuse, dans la mesure où les tarifs interprofessionnels étaient calculés sur une moyenne statistique assez bien identifiée. Lors de l'adaptation du portefeuille, cette moyenne est déséquilibrée. La mise en conformité oblige en effet à modifier la répartition du risque au sein des stocks et à potentiellement accroître le mauvais risque sur le stock interprofessionnel tout en ne tarifant pas suffisamment les contrats nouveaux.
Bref, la situation est une impasse dangereuse.
Comment sortir de cette impasse ?
Dans les prochains jours, BI&T prodiguera quelques "conseils" pour tenir compte de l'évolution du marché. Toujours est-il que, de façon grandissante, le marché s'intéresse aux offres dédiées à plusieurs branches, de préférence lorsqu'elles ont une cohérence professionnelle entre elles. A de nombreux égards, cette astuce, nous le verrons, est le meilleur moyen pour combiner rentabilité et compétitivité.